lundi 9 mars 2015

Le Sel de la Terre

Je n'avais pas encore vu le documentaire de Wim Wenders, "Le sel de la terre". Il passait aujourd'hui dans mon petit cinéma provincial à 14h30 et malgré le soleil resplendissant qui m'invitait plutôt à m'occuper du jardin, je ne voulais pas manquer cette découverte.
 Wim Wenders a rencontré Sebastião Salgado par une de ses photos, celle d'une femme touareg aveugle.

Wenders va entreprendre plusieurs années plus tard, en duo avec le fils du photographe Juliano de réaliser un documentaire - hommage à cet homme qui "aime les êtres humains et, après tout, ce sont les êtres humains qui forment le sel de la terre".
Le film débute par les images effarantes de la mine d'or de Serra Pelada au Brésil. Des cohortes d'hommes remontent sans fin des sacs de terre où git peut-être la pépite qui va les projeter dans une nouvelle vie. Il donne à voir cette concentration de "fourmis humaines" et la vie qui s'organise entre les 50000 hommes et femmes qui s’agglutinent autour de l'énorme trou. 

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Puis le beau visage de Sebastião Salgado émerge du noir et commente les images qui sont  des moments forts de sa vie de photographe mais aussi et surtout d'être humain frotté à des vies qui sont toutes faites de labeur (la main de l'homme) ou de malheur (Exodes) Le montage du film où alternent les photographies commentées par leur auteur, celles prises par d'autres qui le montrent, beau jeune homme avec sa femme Lélia  et les vidéos tournées par son fils, respecte la chronologie des ouvrages tirés de ses périples. 
Les prises de vue des pompiers canadiens tentant d'éteindre les puits de pétrole incendiés par Sadam Hussein au Koweit sont absolument inouïes.

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De l'Ethiopie aux côtés de Médecins du monde, du Congo, du Rwanda ou de la Yougoslavie, il photographie l'insoutenable. La mort provoquée par la famine organisée, la guerre, la folie des hommes,  « on est un animal féroce, notre histoire, c’est celle des guerres ». 
 
Au milieu des débâcles, dont il capture l'horreur surréaliste, il parvient à saisir les instants de tendresse entre un bébé et sa mère.
De cette période 1993- 1999, et particulièrement du génocide au Rwanda il sort malade, psychiquement et physiquement. Il a perdu toute espérance en l'espèce humaine.

C'est sa femme qui va lui redonner goût à la vie en lui proposant de reboiser les terres autour de la ferme parentale qui se sont délitées sous la sécheresse. C'est le projet de l'Instituto Terra
Il va se relancer dans la photographie mais cette fois pour aller à la rencontre des peuples et des animaux qui vivent en harmonie avec la nature ce qui donnera le magnifique "Génésis" 

En commentant la photo d'une d'une vieille tortue des Galapagos il fait l'hypothèse qu'elle a rencontré Darwin
  
tortue
Et constate la troublante ressemblance de la patte de l'iguane et celle des chevaliers du Moyen Age bardés de cottes de mailles

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Un des épisodes drôles du film est celui de  de la reptation pour contourner un ours blanc qui barre la route vers les phoques qu'il faut approcher suffisamment pour en tirer un portrait aussi puissant.

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Ce film est plus qu'un documentaire, il est l'hommage d'un artiste à un autre artiste qui écrit avec la lumière , un langage universel qui peut être lu par tous les humains pour y décrypter  les grandeurs et misères de la condition humaine.
Merci monsieur Wenders

 Merci monsieur Salgado,
(voir ici )

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10 commentaires:

cliclac a dit…

Bonjour,
Belle page qui s'intéresse à un film qui sera projeté au mois de mai à Montignac dans le cadre des rencontres photographiques Cliclac Montignac.
Je vous ai cité sur la page du blog : http://cliclacmontignac.blogspot.fr/p/le-sel-de-la-terre.html

P.-S. So Google le veut bien, l'adresse devrait changer en www.cliclac-apn-montignac.club

patrick.verroust a dit…

Intensité du regard de la femme aveugle, hommes de boues...Que la misère est belle sous l’œil halluciné...De quoi émouvoir en nos féroces cités....Au fin fond des enfers, une goutte de vie fait reculer la mort...Des-espérances ....

Elise a dit…

oui, un beau film qui ne nous laisse pas sur un moment de prostration et de désespoir grâce à une fin à la manière de cette belle histoire de Jean Giono L'homme qui plantait des arbres

Dominique Hasselmann a dit…

Un grand film qui sait allier l'image fixe et l'image animée, l'intensité et la sérénité.

Zoë Lucider a dit…

@Cliclac Montignac Rencontres photographiques, bon choix et merci d'avoir cité ce modeste billet
@PV, halluciné, il y a de quoi tant la réalité est incroyable
@Elise, j'ai pensé à Giono en effet. Bienvenue sous l'arbre.
@DH En avais-tu parlé ? Je suis tellement de façon elliptique que j'ai pu manquer ton billet

Colo a dit…

Bonjour Zoë, j'ai vu ce film il y a un temps avec ma fille. Toutes les deux nous avions beaucoup apprécié le fait que tout au long du film on répète que Salgado a pu réaliser toutes ces photos grâce à sa femme, a pu en vivre grâce à elle, a pu avoir des enfants parce qu'elle s'est occupée de tout pendant qu'il voyageait et, comme tu le dis, c'est elle qui lui redonne force et envie de vivre à la fin.
Force et beauté, merci.

Tania a dit…

Je ne l'ai pas vu, mais ce beau billet d'hommage complète ce que m'en a dit Colo : un film à voir.

Zoë Lucider a dit…

@Colo, en effet et d'ailleurs cette femme respire la force et la joie de vivre. Elle a porté le grand homme et même déclenché sa vocation puisqu'il a commencé à photographier grâce à l'appareil qu'elle s'était procuré pour ses propres études.( mais chut, les hommes n'aiment pas qu'on leur rappelle ce qu'ils doivent à leurs femmes)
@Tania, un film qui ne peut que vous toucher

patrick.verroust a dit…

La force affective dans la famille Salgado est impressionnante....
Que l'humanité arrête de se planter pour se mettre à planter des arbres , j'en doute...
Dans une prochaine vie, être ours polaire...

Zoë Lucider a dit…

@PV, ours solaire plutôt!